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Date de création : 30.03.2011
Dernière mise à jour : 01.11.2025
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MARC DUGAIN dans la tête d'un tueur en série

Publié le 19/06/2012 à 22:17 par lesartsausoleil Tags : vie monde chez histoire heureux france roman dieu film société littérature divers écran papier pensées homme femme

Marc Dugain aime les faits historiques et les faits divers.

Il l'a prouvé à travers ses romans précédents, en abordant l'Histoire par le petit bout de la lorgnette. On le connait surtout désormais pour sa Malédiction d'Edgar (portrait de J Edgar Hoover et d'une Amérique réactionnaire vue à travers le parcours du directeur du FBI, autrement plus probant que le dernier long métrage sans point de vue de Clint Eastwood) ou Une Exécution Ordinaire, portrait sensible de l'URSS sous Staline (mais pas seulement) qu'il a adapté lui-même pour le grand écran en se concentrant sur la fin d'un Staline intime, campé par André Dussolier.

Si La Chambre des Officiers avait déjà connu les faveurs d'une transposition à l'écran et rencontré un beau succès public, on ne saurait trop recommandé au lecteur son méconnu Heureux comme Dieu en France, récit autour de la Résistance qui rappelait l'Ironie du Sort, un film d'Edouard Molinaro qui racontait le parcours de résistants ballottés au gré de décisions contradictoires, en une sorte de pile ou face pouvant inverser le cours des choses.

Avec Avenue des Géants, il s'approprie le parcours d'Ed Kemper, tueur en série qui défraya la chronique aux USA il y a quarante ans, période depuis laquelle il est d'ailleurs enfermé puisque condamné à la prison à vie, pour le meurtre de jeunes filles, mais également pour celui de sa mère (dont il prit la peine de couper la tête avant de s'en servir comme cible à fléchette, la question de son viol post mortem demeurant sujette à caution de sa part), sans oublier le double homicide commis sur ses grands parents paternels, début de sa « carrière » de tueur en série.

Imposant personnage mesurant plus de deux mètres, au Q.I réputé supérieur à la moyenne, Kemper est l'archétype du serial killer rendu populaire par le cinéma, la télévision et la littérature, génie du Mal incarné.

A l'instar de Jean Paul Dubois ou Philippe Besson, Marc Dugain nous embarque aux Etats Unis comme s'il était lui-même un écrivain américain, en ce sens qu'il parvient spontanément à « faire couleur locale » sans que cela paraisse fabriqué. On pourrait presque croire à une traduction d'un roman étranger, tant il foisonne de petits détails, de sons et d'odeurs, au point que rien ne manque à cette reconstitution. Ce qu'il y a de remarquable dans la construction du récit, c'est précisément sa faculté à provoquer chez le lecteur une forme d'empathie pour ce personnage hors norme, dont le masque ne tombe qu'au dernier acte, bien qu'on sache précisément ce qu'il advint de lui puisque le roman débute par une présentation de sa vie carcérale et de ses occupations de réprouvé de l'humanité.

A quelques détails près, afin de s'exonérer de l'aspect biographique inhérent à tout portrait fidèle et d'avoir en quelque sorte à mettre en vedette une telle engeance (car Ed Kemper est bien un monstre au sens où il semble capable de faire le distingo entre le bien et le mal et qu'il est de ces êtres qui n'éprouvent aucun remords, aucun sentiment pour leurs victimes). Il est un peu le modèle de « héros » négatifs tels que Dexter, tueur en série agissant comme un rédempteur, exécuteur de ses semblables, vengeur des faibles. Or tout le monde sait que les tueurs en série s'en prennent précisément aux êtres les plus faibles, en tout cas plus faibles qu'eux.

La fiction n'est ici pas loin de la réalité même si sciemment, Marc Dugain évite le piège de la violence facile induite par une telle thématique, contournant la difficulté en s'attachant à tout ce qui précède le passage à l'acte, quand l'être tenté oscille encore au seuil du gouffre où ses pensées malsaines veulent le plonger. En équilibre instable sur la ligne jaune de ses désirs, de ses pulsions homicides les plus perverses, l'Ed Kemper de papier (Al Kenner...) de Marc Dugain trompe son monde en expert es dissimulation et fait constamment semblant de vouloir se réinsérer au sein d'une société qu'il traverse comme un parfait alien.

Menace permanente, grenade dégoupillée ne demandant qu'à exploser, il fait froid dans le dos du lecteur autant qu'il l'intrigue et le force à s'interroger sur cette fascination/répulsion qu'il sécrète tel un poison machiavélique. De ces romans qui rappellent de manière lancinante que l'homme est bien un loup pour l'homme... et plus encore pour la femme !